LE FORUM MONDIAL DE L’EAU
Le Forum mondial de l'eau s'est ouvert à Mexico. Plus d'un milliard de personnes dans les pays en développement n'ont toujours pas accès à une eau potable.
Cela devait être le millénaire de l'abondance. Celui où l'eau potable coulerait dans chaque foyer, étanchant enfin la soif d'une grande partie de l'humanité. Mais les statistiques font mentir les rêves. Dans les pays en développement, plus de 1 milliard de personnes (près de une sur cinq) n'ont toujours pas accès à une eau potable. Et 40 % des 6,5 milliards d'êtres humains que compte la planète ne bénéficient pas de système d'assainissement de base. Des existences au compte-gouttes, dont la vie ou la mort dépend de cet or bleu. L'eau est de plus en plus évoquée comme un problème, voire le problème du XXIe siècle.
Objectifs. En
septembre 2000, la quasi-totalité des dirigeants du monde, réunis sous l'égide
des Nations unies, adoptait le pacte du «millénaire pour le développement». La communauté internationale se
fixe alors une feuille de route en huit points, les fameux «objectifs du
millénaire». Ces objectifs pour
le développement humain, qui vont de la réduction de moitié de l'extrême
pauvreté à l'éducation primaire pour tous, en passant par l'arrêt de la
propagation du VIH-sida, et ce à l'horizon 2015, devaient constituer un schéma
directeur pour l'avènement d'un monde meilleur. Dans ce début de solidarité
planétaire, l'eau, aussi vitale qu'inégalement répartie, avait une place
centrale. Là encore, l'engagement est ferme : réduire de moitié d'ici à 2015 la
population qui n'a accès ni à l'eau ni à l'assainissement. Las ! six ans plus
tard, la situation n'a guère évolué. «On fait du
surplace, se plaint Daniel Zimmer, directeur exécutif du Conseil
mondial de l'eau. La
communauté internationale ne se donne pas les moyens suffisants.»
Selon ce conseil, les évaluations mondiales estiment entre 9 et 30 milliards le
besoin en nouveaux financements. Un montant nettement en deçà des 180 milliards
de dollars dont faisait état la Banque mondiale à la fin des années 90. «Ces investissements étaient surévalués car
calqués sur les modes de consommation occidentaux», poursuit Daniel
Zimmer. Vrai gain. Les multinationales du secteur privé, qui s'étaient posées
en chantres du développement des infrastructures dans les pays en
développement, ont montré leurs limites au travers de déboires dans plusieurs
pays d'Amérique latine ou d'Asie. Faut-il pour autant tout reléguer au public ?
Pas sûr, estiment de nombreux experts ou responsables d'ONG. «Il faut surtout que l'eau soit gérée au
niveau local, et non pas au niveau des gouvernements centraux. C'est la seule
façon d'éradiquer la corruption, d'impliquer les populations au plus près des
projets hydriques», estime Daniel Zimmer. Mais les études ne
manquent pas pour montrer la rentabilité de tout investissement public dans
l'approvisionnement en eau ou l'assainissement des réseaux. Ainsi, selon
l'Institut international de l'eau, pour 1 dollar dépensé, entre 3 et 34 dollars
sont gagnés par la collectivité. Le vrai gain n'est pas financier, il se compte
en nombre de personnes qui ne tombent plus malades à cause de maladies liées à
l'eau, ou de femmes qui peuvent travailler au lieu d'aller chercher de l'eau.
A prix d'or. A
Mexico, ils seront sans doute nombreux, ministres et autres représentants de la
société civile, à raconter encore et encore l'histoire de ces pays où le vide
de services des eaux laissé par les pouvoirs publics est en général comblé par
une foule de fournisseurs indépendants qui revendent l'eau à prix d'or. A
Port-au-Prince, en Haïti, le mètre cube d'eau est vingt fois plus cher que
celui du réseau public. Autant d'argent que la population pourrait dépenser
dans l'éducation ou la santé. A Mexico, les inquiétudes porteront aussi sur
l'accroissement des populations urbaines. Un exemple ? La Chine, compte
aujourd'hui plus de 600 villes, contre 130 en 1949.